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Ecrins de poésie
29 juillet 2012

Derrière chez moi...

derrière chez moi

 Beauval - Somme -

 Trois petits textes écrits à l'atelier d'écriture de Sylvie Chaudoreille

 

Derrière chez moi, savez-vous quoi qu'y a ?

Y a un églantier tout en fleurs roses au printemps

Derrière l'églantier, savez-vous quoi qu'y a ?

Y a un grand pré, on fait les foins et ça sent bon le foin coupé

Derrière le pré, savez-vous quoi qu'y a ?

Y a une haie, une haie de troènes et de thuyas,

C'est celle qui longe l'allée qui va au cimetière

Et ça sent bon les fleurs de troène et l'odeur âcre des thuyas

Derrière la haie, savez-vous quoi qu'y a ?

Y a le clocher de l'église avec sa flèche de pierre

Et son horloge

Et sa cloche qui sonne, toutes les heures...

 

 

 PETITE

  Petite, te souviens-tu de l'odeur de la pluie sur la terre ?

Quand le soir tu sortais après l'averse, pieds nus sur l'herbe du jardin, la fraicheur sur la plante des pieds et entre les orteils ; ta mère te cherchait, tu l'entendais t'appeler dans la grande maison. Tu voyais au loin, la sombre bâtisse avec ses fenêtres éclairées dans la nuit, et tu ne bougeais pas, tu gagnais sur les minutes et les secondes, le plus de temps possible, à faire pénétrer dans ton corps, le parfum de la terre mouillée.

 

  

DANS MON PAYS

 Dans mon pays, on ne ferme jamais les portes à clé.

 On les ouvre, on les ferme, on les claque, on les entrouvre, on les referme doucement, on sonne à la porte :

«Entrez, c'est ouvert !» La lourde porte grince sur ses gonds, c'est Robert, le marchand de légumes qui a garré son vieux camion Citroën devant la grille.

Il entre, il s'assoit, il boit le café qui attend sur le coin de la cuisinière à charbon, il soulève sa casquette avec deux doigts, s'essuie le front avec son mouchoir à carreaux

"Allez, tchotte, va tcheure inne pèmme, alles sont boènnes, innui !"

"Allez, petite, va chercher une pomme dans l'camion !, elles sont bonnes aujourd'hui !"

 

 

 

Dans mon pays, les tendres preuves du printemps et les oiseaux mal habillés sont préférés aux buts lointains.
La vérité attend l'aurore à côté d'une bougie. Le verre de fenêtre est négligé. Qu'importe à l'attentif.
Dans mon pays, on ne questionne pas un homme ému.
Il n'y a pas d'ombre maigre sur la barque chavirée.
Bonjour à peine est inconnu dans mon pays.
On n'emprunte que ce qui peut se rendre augmenté.

Il y a des feuilles, beaucoup de feuilles sur les arbres de mon pays. Les branches sont libres de ne pas avoir de fruits.

On ne croit pas à la bonne foi du vainqueur.

Dans mon pays, on remercie.



René Char Qu'il vive (1968) (Extrait des Matinaux)

 

 

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