Cécile Perin, les femmes aussi écrivent pendant la 1ère guerre mondiale.
Il n'y a pas que des soldats qui écrivent sur la guerre : des femmes s'émeuvent du massacre. Ainsi Cécile Perin appelle ses soeurs à la révolte.
Les femmes de tous les pays
Les femmes de tous les pays
A quoi songent-elles, muettes
Celles à qui la guerre a pris
Le bonheur ? Les femmes qui guettent
Les femmes de tous les pays,
O complices inconscientes,
Vous étouffez encore vos cris,
Vous êtes là, comme en attente.
Les femmes de tous les pays,
La voix meurt donc dans votre gorge
Quand ce sont vos hommes, vos fils,
Que l'on mutile ou qui s'égorgent.
Cécile Perin.
Cécile-Elisa Martin est née à Reims le 29 janvier 1877. Elle épouse Georges Perin qui est aussi poète.
Le couple fréquent l'abbaye de Créteil (réunion de poètes). Cécile Perin est membre des "Poètes du divan", revue de littérature et d'art, et, par ailleurs, la seule femme admise dans cette assemblée. Elle prend plus, ou moins, position contre la guerre 14/18.
En 1956, elle reçoit le prix de l'Académie française pour l'ensemble de son oeuvre poétique.
Elle meurt en 1959.
En 1911, elle écrivait la Paix :
Aube
Un invisible oiseau dans l'air pur a chanté.
Le ciel d'aube est d'un bleu suave et velouté.
C'est le premier oiseau qui s'éveille et qui chante.
Ecoute ! les jardins sont frémissants d'attente.
Ecoute ! Un autre nid s'éveille, un autre nid,
Et c'est un pépiement éperdu qui jaillit.
Qui chante le premier ? Nul ne le sait. C'est l'aurore.
Comme un abricot mur, le ciel pâli se dore.
Qui chante le premier ? Qu'importe ? On a chanté.
Et c'est un beau matin de l'immortel été.
***
Nuit
Sur la terre du jardin qui noircit les doigts
La terre au parfum de sang
Après la pluie
Les gouttes d'eau s'écrasent
Dans l'air aux résonances noires.
Suzanne s'est penchée sur la terre
Au loin elle entend le canon qui gronde.
Sur la terre ouverte et noire
La terre souillée de sang
Après la bataille
Le fer rougi s'écrase
Quand aux après-midi sonores
Après le feu
Le silence encore tout chargé de cris
Poursuit la peur
Et les rêves en écho des soldats
Qu'on dirait endormis.
Sylvie Damagnez
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